La psychiatrie en France
- Par cabinetyannbotrel
- Le 23/06/2021
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La psychiatrie en France a beaucoup évolué depuis ses origines, notamment avec la révolution de la pharmacopée des psychotropes (invention du premier neuroleptique en 1952), et la mise en place du principe de sectorisation depuis 1960. La baisse des crédits et des effectifs affectés à la psychiatrie hospitalière, et notamment la baisse du nombre de lits disponibles, qui sont passés de 120 000 lits au début des années 80 à 55 000 lits en 2011, ont fait l'objet d'un certain nombre de critiques, une partie de la population relevant de soins psychiatriques se retrouvant incarcérée dans des établissements pénitentiaires, ou à la rue et encore encore dans des établissements médico-sociaux où ces malades n'ont pas leur place.
Législation et psychiatrie française
Un principe fondamental : la sectorisation
En France, la psychiatrie est régie selon le principe de la sectorisation depuis la loi du 31 décembre 19857 qui confirme une politique suivie dès les années 1960. En effet depuis cette date, chaque aire géographique bien délimitée, correspond à un service donné dans un établissement hospitalier de référence. L'aire géographique concernée, d'environ 70 000 habitants, est donc « rattachée » à une unité précise, où seront pris en charge, tous les types de pathologies psychiatriques. L'origine géographique déterminant ainsi le lieu de soins.
La santé mentale est prise en charge selon la modalité de la psychiatrie de secteur avec des structures alternatives à l'hôpital afin d'organiser le suivi médico-psychologique rattachées à un hôpital de référence.
Le principe du secteur psychiatrique a toutefois été remis en cause avec la Loi HPST de 2009 qui a instauré des territoires de santé géographiquement plus vastes que les secteurs psychiatriques.
Les différents modes d'admission à l'hôpital
Depuis la loi no 2011-803 du 5 juillet 2011, le terme « hospitalisation » a été remplacé par le concept de « soins psychiatriques ». En effet, au bout d'une période de 72 heures après l'admission en soins sous contrainte (obligatoirement en hospitalisation complète), le psychiatre hospitalier peut proposer, au directeur de l'établissement ou au Préfet, de poursuivre les soins, soit en hospitalisation complète, soit en programme de soins (c'est-à-dire des soins alternatifs à l'hospitalisation complète qui peuvent comporter des hospitalisations à temps partiel, des soins ambulatoire ou à domicile). Ainsi, il existe 3 modalités d'admission en soins psychiatriques :
« SL » (soins libres)
C'est une admission en soin libre, le patient accepte les soins ;
Il existe deux types d'admission en soins psychiatriques sous contrainte :
« SDRE » (Soins sur Décision du Représentant de l'État)
C'est un mode d'admission décidé par le représentant de l'État dans le département. Cette modalité intervient si le patient souffre de troubles mentaux qui nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte, de façon grave, à l'ordre public. Les pièces nécessaires :
le certificat médical d'un médecin, qui ne peut être un psychiatre de l'établissement d'accueil.
un arrêté préfectoral.
En cas d'urgence, le Maire, ou à Paris le Commissaire de police, peuvent décider, au titre des mesures provisoires, l'envoi de la personne en hospitalisation sous contrainte à temps complet. Ces décisions son caduques au bout de 48 heures si elles ne sont pas relayées par un arrêté préfectoral.
La demande de levée, ou de transformation en programme de soins, des soins sur décision du représentant de l'État peut être faite au préfet par le médecin de l'établissement. Celui-ci accepte ou non la demande de levée. En cas d'acceptation, et dès retour de l'arrêté préfectoral, le patient n'est plus soumis à cette mesure et peut sortir de l'établissement ou choisir de poursuivre des soins libres.
Il existe une procédure renforcée pour les personnes en soins sur décision du représentant de l'État (SDRE), qui ont été déclarés pénalement irresponsables, pour des faits pour lesquels elles encouraient une peine d'au moins 5 ans de prison, pour les atteintes aux personnes, ou d'au moins 10 ans de prison pour les atteintes aux biens. Cette procédure, instaurée par la loi du 5 juillet 2011, a été réformée et allégée par la loi du 27 septembre 20138, qui a pris acte de la décision de censure partielle de la loi du 5 juillet 2011, prise le 20 avril 2012 par le Conseil constitutionnel sur une question prioritaire de constitutionnalité9. Dans le cadre de ce régime dérogatoire la levée de la mesure de contrainte préfectorale est subordonnée à l'avis d'un collège de trois soignants de l'établissement, ainsi qu'à celui de deux psychiatres experts extérieurs à l'établissement. L'avis collégial et les expertises sont transmis au Préfet, ou au juge des libertés et de la détention en cas de contrôle de légalité, afin que la levée de la mesure ou sa transformation en programme de soins soit ou non décidée.
« SDT », ou « SPI » (soins sur demande de tiers ou en cas de péril imminent)
Utiles lorsque les troubles mentaux de la personne rendent impossible son consentement et que son état mental impose des soins immédiats assortis soit d'une surveillance médicale constante. Il existe 2 types de soins sur demande d'un tiers (SDT), auxquels se rajoute le cas des soins en cas de péril imminent sans qu'un tiers ait été trouvé (SPI) :
l'admission en SDT dite classique pour laquelle il faut :
une demande manuscrite de tiers (par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade) ;
les certificats médicaux circonstanciés de deux médecins dont l'un est extérieur à la structure d'accueil.
l'admission en SDT pour cas d'urgence mise en place lorsqu'il existe un risque grave d'atteinte à l'intégrité du malade, il faut :
une demande manuscrite de tiers (par un membre de la famille du malade ou par une personne justifiant de l'existence de relations avec le malade antérieures à la demande de soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celui-ci, à l'exclusion des personnels soignants exerçant dans l'établissement prenant en charge la personne malade) ;
un certificat médical d'un médecin pouvant provenir d'un médecin de l'établissement d'accueil.
l'admission en cas de péril imminent, qui est dûment constaté par un certificat médical et dans le cas d'une impossibilité d'obtenir une demande de tiers.
Ce certificat constate l'état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Le médecin qui établit ce certificat ne peut exercer dans l'établissement accueillant la personne malade. Dans ce cas, le directeur de l'établissement d'accueil informe, dans un délai de vingt-quatre heures sauf difficultés particulières, la famille de la personne qui fait l'objet de soins et, le cas échéant, la personne chargée de la protection juridique de l'intéressé ou, à défaut, toute personne justifiant de l'existence de relations avec la personne malade antérieures à l'admission en soins et lui donnant qualité pour agir dans l'intérêt de celle-ci.
Les soins sur demande d'un tiers, ou en cas de péril imminent, peuvent être levés à tout moment par le directeur de l'hôpital, sur un certificat médical prescrivant la levée de la mesure du psychiatre suivant la personne sous soins sous contrainte. À noter que le directeur de l'hôpital est en « compétence liée » avec le médecin psychiatre, et qu'il doit suivre la prescription médicale de levée. Les membres de la famille du tiers peuvent demander la levée des soins, à laquelle le psychiatre peut s'opposer.
La prise en charge des patients sous contrainte
Le patient sous contrainte est obligatoirement admis pendant une durée de 72 heures maximum en hospitalisation complète. Durant cette période dite d'observation et de soins, deux certificats médicaux seront établis: un de 24 heures et un des 72 heures. C'est au cours de cette période d'observation d'un maximum de 72 heures, que le psychiatre pourra choisir entre les différents modes de prise en charge, soins libres, soins sous programmes de soins ou en hospitalisation complète sans consentement. Ensuite un avis sera établi dans les 8 jours à dater de l'admission jour concernant le maintien de la mesure pour le contrôle judiciaire obligatoire de quinzaine. La date butoir du 15e jour passe au 12e jour au 1er septembre 2014, selon la loi du 27 septembre 2013, réformant partiellement la loi du 5 juillet 2011. Les certificats médicaux qui suivent doivent être effectués mensuellement.
Intervention du juge de la liberté et de la détention
C'est à la suite d'une décision du Conseil Constitutionnel du 26 novembre 2010 sur une question prioritaire de constitutionnalité10 que l'intervention du juge dans les hospitalisations sans consentement à temps complet des patients sous contrainte a été introduite. En effet, l'article 66 de la Constitution instaure le juge judiciaire comme garant de la liberté individuelle. Or les patients sous contrainte, privés de liberté ne bénéficiaient pas, avant cette loi, d'un tel contrôle obligatoire. Ainsi, tous les patients admis en hospitalisation sous contrainte, pris en charge sous le mode de l'hospitalisation complète, voient aujourd'hui la mesure qu'ils subissent contrôlée :
avant les quinze jours (12 jours à dater du 1er septembre 2014) qui suivent leur admission ou leur réadmission ;
puis tous les 6 mois en cas d'hospitalisation complète continue.
Un arrêt du Conseil d'État du 13 novembre 2013 annule, dans le sens d'une meilleure protection des hospitalisés à la demande d'un tiers, le décret no 2011-846 du 18 juillet 2011 en tant qu’il ne prévoyait pas, au 1° de l'article R. 3211-11 du Code de la santé publique, la transmission systématique au greffe du tribunal de grande instance, dans les cinq jours à compter de l’enregistrement de la requête, de la décision d'admission prise par le directeur de l'établissement. Celle-ci désormais doit être écrite et motivée en droit comme en fait.
Surconsommation de psychotropes
La France est un pays dont la population consomme notoirement plus de médicaments psychotropes que les autres pays avancés.
Ainsi on constate :
une surconsommation de traitements psychotropes en France 2 fois plus importante que dans les pays d'Europe limitrophes de la France ;
durant l'année 1997, 12 % des Français âgés de plus de 15 ans ont consommé un ou plusieurs psychotropes dont 7,9 % un anxiolytique, 4,7 % un hypnotique, 3,6 % un antidépresseur et 1,5 % un neuroleptique. Après 50 ans pour les femmes et après 60 ans pour les hommes, plus d'une personne sur six a consommé un ou plusieurs psychotropes ;
trop de Français, en particulier après 60 ans, sont traités sur des durées trop longtemps par des psychotropes : 11 % des Français sont des consommateurs réguliers de psychotropes (au moins une fois par semaine et depuis au moins six mois), 29 % des femmes entre 60 et 69 ans, plus de 34 % des femmes âgées de plus de 80 ans) ;
une inadéquation de l'utilisation des antidépresseurs en ville dans un nombre de cas inacceptable. Plus du tiers des antidépresseurs sont prescrits en dehors des indications de l'autorisation de mise sur le marché : environ 20 % des prescriptions ne reposent sur aucun diagnostic psychiatrique étayé ;
des prescriptions souvent fondées sur l'existence d'une plainte monosymptomatique : par exemple la tristesse qui est assimilée à une dépression ;
de nombreuses prescriptions sont reconduites en l'absence de symptômes. La durée de prescription des antidépresseurs excède un an dans plus de la moitié des cas, contrairement aux recommandations en vigueur ;
les coprescriptions, notamment entre antidépresseurs et anxiolytiques ou entre anxiolytiques et hypnotiques sont fréquentes mais rarement justifiées au long cours.
psychiatre psychologue psychanalyste
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